Chronologie générale
Cette frise couvre environ 800 000 ans, du Paléolithique ancien à nos jours, et concerne soit la péninsule eurasienne, soit la France métropolitaine actuelle.
Paléolithique inférieur
Le Paléolithique (étymologiquement : âge de la pierre ancienne) débute avec les premiers outils en pierre taillés il y a 3,3 Millions d’années (Ma) au Kenya. Toutefois, l’espèce qui les a fabriqués n’est pas encore connue.
À ce jour, les plus anciens restes osseux humains, découverts en Afrique, attestent l’apparition du genre Homo il y a 2,4 Ma.
Dans le reste du monde, les premières traces de fabrication d’outils (vers 2 Ma en Asie et vers 1,4 Ma en Europe de l’Ouest) sont concomitantes de l’arrivée des premiers humains. Ces derniers diffusent les traditions techniques héritées de leurs ancêtres africains.
Inventée au Paléolithique inférieur, la fabrication d’outils lithiques est observée depuis au moins 2,6 Ma, même si un site datant de 3,3 Ma illustre sa précocité sur le continent africain. Si les humains ne sont pas les seuls primates possédant cette faculté, ils mettent au point des techniques de taille qui leur sont propres.
Jusque vers 1,8-1,6 Ma, la recherche d’un tranchant unilatéral prévaut ; il est obtenu soit en débitant un éclat à partir d’un galet, soit en façonnant le cœur du galet après avoir retiré des éclats en périphérie. Puis deux nouveaux outils plus sophistiqués sont mis au point en Afrique : le hachereau et le biface. Leurs deux faces travaillées montrent la recherche d’une symétrie et une maîtrise accrue du geste. En Europe, les cultures à bifaces et hachereaux n’arrivent qu’1 Ma plus tard environ, à l’occasion d’une vague de migration tardive. Elles coexistent avec les cultures à éclats et galets aménagés durant plusieurs centaines de millénaires.
La transmission des savoir-faire techniques de la fabrication d’outils semble difficilement avoir pu se faire par simple imitation du geste ; elle a sans doute été possible grâce à un langage, même rudimentaire. De même, la coordination nécessaire aux actions de chasse collective suppose une communication orale. Cette dernière est envisageable au vu des caractéristiques anatomiques (endocrâne et larynx) des premiers humains.
Autour de 450 000, les foyers attestant la maîtrise du feu se multiplient simultanément dans tout l’Ancien Monde, comme le montrent de nombreux sites de Menez-Dregan (Finistère) à Chou Kou Tien (Chine). Cruciale, cette innovation permet d’adopter un régime alimentaire cuit. En outre, l’exploitation des espaces situés sous de hautes latitudes devient envisageable, les grands carnivores peuvent enfin être repoussés et la socialisation du groupe se renforce autour du foyer. En Afrique du Sud (grotte de Wonderwerk) ou en Israël (Gesher Benot Ya'akov), des analyses du sol attestent l’utilisation du feu dès 1 Ma ou 700 000. Toutefois, il est difficile de distinguer les traces résultant de l’entretien d’un feu d’origine naturelle (incendie de forêt, foudre…) de celles issues d’un feu produit par l’Humain.
Paléolithique moyen
En Europe, cette période est marquée par l’émergence, l’apogée puis l’extinction d’une nouvelle espèce humaine : l’Homme de Néandertal.
Résistant à l’alternance de périodes tempérées et de phases froides très rigoureuses durant environ 250 000 ans, cette espèce occupe seule le territoire européen s’étendant de la péninsule Ibérique à l’extrême sud de la Sibérie.
Au cours de sa longue existence, Néandertal se propage au Proche-Orient où il côtoie l’Homo sapiens originaire d’Afrique et jusqu’en Asie où il coexiste avec l’Homme de Dénisova.
Durant le Paléolithique moyen, les Néandertaliens font preuve d’une surprenante adaptabilité en élaborant des moyens pour survivre aux fortes oscillations climatiques qui ponctuent leurs 250 000 ans d’existence.
Les systèmes techniques qu’ils mettent au point mobilisent des capacités de réflexion et de planification inégalées jusqu’alors par un représentant du genre Homo, et ce bien avant qu’ils ne côtoient Homo sapiens. Pour la plupart en germes dès la fin du Paléolithique inférieur, ces inventions atteignent leur pleine maturité au début du Paléolithique moyen.
Innovation sociale et innovation technique s’enrichissent mutuellement. Ainsi, l’amélioration des emmanchements et des pointes d’outils permet aux Néandertaliens de chasser plus efficacement en groupe mais aussi d’exploiter de nouvelles ressources marines et végétales pour se nourrir. Les traces interprétées aujourd’hui comme celles de construction d’abris, de litière de couchage et de maîtrise du feu témoignent d’une structuration des activités et des espaces de vie résidentiels au sein du campement nomade. Les vestiges fossiles retrouvés dans des cuvettes peu profondes creusées à même le sol permettent de croire que les Néandertaliens utilisent des sépultures et s’adonnent à des rites funéraires.
Si les bases de la taille de pierre sont posées par leurs ancêtres, les Néandertaliens élaborent un système de débitage beaucoup plus précis et efficace. Nommé « Levallois » en raison de son lieu de découverte à la fin du XIXe siècle à Levallois-Perret (France), ses premières manifestations remontent à 320 000 ans environ avant notre ère en Europe occidentale. Particulièrement complexe à exécuter, il consiste à préparer le bloc de matière première afin d’obtenir un éclat régulier, qui sera utilisé brut puis réaffuté. Nécessitant de l’anticipation, cette méthode, dite « prédéterminée », constitue un grand pas dans l’histoire matérielle de la Préhistoire.
Paléolithique supérieur
À l’issue d’une cohabitation avec les Homo sapiens au cours des premiers millénaires du Paléolithique supérieur en Europe, les Néandertaliens disparaissent vers -30 000. Les Homo sapiens deviennent alors la seule espèce représentante du genre Homo.
Ils mettent au point des traditions plus variées et plus régionalisées qu’auparavant : la diversification des outils et des armes s’accélère, les parures corporelles se multiplient et l’art figuratif fait son apparition.
Aux yeux de certains auteurs, ces nouveaux traits culturels fondent les comportements de toutes les sociétés ultérieures.
Bien que dix fois moins long que le Paléolithique moyen qui le précède, le Paléolithique supérieur connaît des mutations techniques et sociales beaucoup plus nombreuses.
Dès lors que les Homo sapiens se mettent à exploiter toutes les parties des carcasses animales, ils diversifient leurs productions artisanales. Pour la première fois, le bois de cervidé, l’ivoire et l’os sont transformés en armes (certaines pointes de sagaie, des propulseurs, des harpons, etc.), mais aussi en nouveaux outils. Par exemple, la généralisation du lissoir, en bois de cervidé ou en os, facilite le travail des peaux, celles du renne notamment. L’invention, faussement modeste, de l’aiguille à chas révolutionne leur assemblage et donne naissance à des vêtements plus isolants. Cette dernière permet aussi de construire des huttes en peaux à la fois solides, pour résister aux aléas climatiques, et légères pour pouvoir être transportées. Ces nouvelles matières premières animales sont employées, en outre, pour fabriquer des parures qui semblent servir à marquer non pas une hiérarchisation sociale, mais plutôt le sexe et l’âge des individus au sein des groupes.
La différenciation des identités transparaît aussi, pour la première fois, à travers les représentations artistiques. En Europe, les premières gravures, sculptures et peintures figuratives montrant des femmes, des hommes et des animaux sous des traits réalistes sont, à ce jour, attribuées aux Homo sapiens.
Ces derniers innovent dans le domaine cynégétique. Ils abandonnent les armes de poing (épieux et lances) au profit d’armes de jet qui leur permettent désormais de réduire le risque d’un contact fatal avec l’animal et de chasser éventuellement seul, sans l’aide du groupe auparavant indispensable. Les armes composites se développent. La sagaie, par exemple, voit sa précision, sa vitesse et sa force de pénétration augmentées grâce au propulseur qui agit par un effet de bras de levier afin d’atteindre des proies robustes à distance. L’arc commence même probablement à être employé, comme le laissent penser certaines pointes de silex manifestement trop petites pour avoir armé des sagaies.
Mésolithique
Au Mésolithique, le réchauffement climatique débuté vers -10 000 entraîne des modifications de l'environnement et favorise un mode de vie semi-nomade.
Progressivement, les déplacements saisonniers de ces derniers chasseurs-cueilleurs deviennent moins fréquents. Ils élaborent des arcs et des flèches dotées de pointes en silex de très petite dimension (microlithes) leur permettant de chasser le gibier peuplant les nouvelles forêts tempérées (cerf, sanglier, chevreuil…).
Toujours nomades, les humains du Mésolithique conservent un mode de vie basé sur la chasse, la pêche et la cueillette, qui s’achève avec l’arrivée des agriculteurs-éleveurs du Néolithique entre - 5800 dans le sud de la France et - 5300 dans l’est.
Les industries lithiques du Mésolithique se caractérisent par une production de pointes de flèches en silex de très petite taille (microlithes), destinées à être emmanchées sur des flèches en bois. En effet, à cette période, la pratique de la chasse à l’arc se généralise car elle permet d’abattre un gibier caractéristique des forêts tempérées (cerf, sanglier, chevreuil…).
Le réchauffement climatique conduit d’autre part à une remontée du niveau marin provoquant notamment l’inondation de la Manche et d’une grande partie de l’actuelle mer du Nord. La perte de certains territoires a pu entrainer par conséquent des migrations de populations ainsi que l’isolation de la Grande-Bretagne.
Les réponses à ces transformations du milieu (migrations, nouveaux réseaux d’échanges, rapprochement des ressources marines…) sont des sujets fortement débattus par les spécialistes de la période. Ils prennent aujourd’hui une autre dimension avec l’accélération du réchauffement climatique.
Néolithique
Depuis trois millions d’années, la subsistance des chasseurs-cueilleurs dépend de la quantité des ressources disponibles dans leur environnement. Au Néolithique, les agriculteurs-éleveurs entreprennent de domestiquer certaines espèces végétales et animales afin de produire leur nourriture.
Qualifié par certains auteurs de « révolution », ce rapport de contrôle vis-à-vis de la nature fonde encore nos modes de vie actuels.
Ce processus éclot en diverses zones de notre planète entre -10 000 et -3 000, avant de se diffuser auprès de la quasi-totalité de la population mondiale, notamment vers -5800 sur le territoire correspondant à la France actuelle.
Le processus de domestication de certaines espèces animales et végétales bouleverse fortement le mode de vie des humains. Contraint d’être présent en continu à proximité des champs cultivés pour se nourrir, il se sédentarise.
Le stockage, qui existait déjà aux périodes plus anciennes, devient une préoccupation importante : le silo se généralise. Creusé à même le sol, à proximité ou dans l’habitat, il permet la conservation des semences dans un milieu pauvre en oxygène. De plus, dans les régions du sud, on creuse de vastes caves souterraines, tandis que dans les zones plus humides, des greniers surélevés sont construits. Le sel, fortement exploité ainsi que le séchage, la graisse et la fermentation permettent de retarder la péremption des viandes et des produits laitiers. Les premières faisselles destinées à fabriquer des fromages apparaissent à cette époque.
Au fil du Néolithique, l’outillage agricole se complexifie. Le rudimentaire bâton à fouir est remplacé par l’araire vers 2600 avant notre ère. Tracté par des bovins et guidé par l’homme, il permet de fendre profondément la terre sans la retourner. La puissance de traction animale est également utilisée pour transporter de grosses quantités de marchandises. L’invention du joug, du timon, du travois et de la roue pleine facilite les trajets auparavant parcourus à pied et favorise ainsi les échanges commerciaux. Par ailleurs, la diffusion à longue distance de l’obsidienne provenant d’îles méditerranéennes prouve que les Néolithiques européens voyageaient aussi par voies d’eau grâce à de petites embarcations, tels des pirogues ou des radeaux.
À partir de 3500 avant notre ère, la métallurgie du cuivre se développe en Europe occidentale. Alênes, perles, petites haches ou encore lames de poignard viennent s’ajouter aux productions artisanales néolithiques déjà nombreuses. La création inédite de richesses, la concurrence pour les terres les plus fertiles ou les ressources les plus précieuses sont à l’origine de la multiplication des rixes entre groupes d’individus. Si la guerre existe déjà aux périodes plus anciennes, elle devient ; à partir du Néolithique, un élément constitutif de la société. La symbolique artistique valorisant la puissance armée ainsi que les vestiges des premiers habitats fortifiés l’attestent clairement.
Âge du Bronze
Sédentarisées depuis le Néolithique, les hommes et les femmes de l’âge du Bronze perfectionnent leurs techniques agricoles et deviennent des virtuoses de la métallurgie du bronze.
Plébiscité pour fabriquer des outils, des armes et des parures, cet alliage dont la couleur évoque l’or nécessite d’établir de nouveaux circuits à travers l’Europe afin de s’approvisionner en cuivre et en étain.
Permettant aussi d’acheminer d’autres biens recherchés comme l’or, l’argent, l’ambre ou le sel, ces liaisons terrestres et maritimes inédites constituent le premier phénomène de globalisation européenne.
Prise entre la révolution néolithique et nos fiers « ancêtres », les Gaulois de l’âge du Fer, la période de l’âge du Bronze fait partie des oubliées de la grande Histoire de France, celle des manuels scolaires. Pourtant, de nombreuses innovations, généralement attribuées aux périodes plus récentes, naissent dès cette époque.
Dès le IIe millénaire avant notre ère, le territoire équivalent à la France, et plus particulièrement sa région ouest, est un espace structuré par des chemins et des parcelles rectilignes cultivées selon des principes d’agriculture raisonnée, comme la jachère. Les nombreuses fermes, composées de cours, d’avant-cours, de bâtiments résidentiels, d’annexes et d’étables, n’ont rien à envier à celles qui occupaient encore nos campagnes avant-guerre.
À partir de 1500 avant notre ère, des bateaux chargés de marchandises voguent sur la Manche, participant à un florissant réseau économique vers l’Angleterre. Des haches, normandes ou picardes, par exemple, ainsi que la faïence, le verre, le textile, produits depuis le début de l’âge du Bronze sur toute la péninsule européenne, sont diffusés Outre-Manche. La thésaurisation d’objets constatée dans plusieurs régions d’Europe tend aussi à montrer le dynamisme économique de ces populations ; même si ces objets ont pu être accumulés dans un double but de culte et de réserve de richesses.
Plus tragiquement, les charniers de Tormarton (Angleterre) ou du Nord-Trøndelag (Norvège) et le champ de bataille de Tollense (Allemagne) attestent des épisodes conflictuels qui assombrissent l’Europe entre 1300 et 1200 avant notre ère. Ces tensions résultent-elles d’une funeste contagion avec les civilisations de la Méditerranée grecque (de l’Italie à la Grèce) et orientale (de l’Égypte à la Mésopotamie) qui s’effritent, avant de s’effondrer en 1177 avant notre ère ? Quoiqu’il en soit, les casques typés selon les régions (à crête à l’ouest de l’Europe, coniques à l’est, à cornes type Viso au Danemark…), ainsi que la sophistication des armures, cnémides, boucliers, épées, lances ou l’utilisation du char à deux roues montrent combien la guerre et le mercenariat se perfectionnent à cette époque.
Âge du Fer
La société se structure fortement à l’âge du Fer. Une élite dirigeante organise la répartition du travail, crée des agglomérations et connecte l’économie locale au réseau d’échanges méditerranéen en pleine expansion.
Désignés sous le terme générique de « Celtes » par les Grecs et les Romains, les habitants du territoire correspondant à la France actuelle sont en réalité pluriels et connaissent des évolutions différentes selon les régions. Si les textes d’auteurs grecs et romains sont les seuls témoignages écrits à être parvenus jusqu’à nous, les découvertes archéologiques forgent aussi notre connaissance de ces huit siècles clôturant la Protohistoire.
La forte spécialisation des artisans à partir de l’âge du Fer conduit à des progrès techniques dans de nombreux domaines. C’est notamment une période faste pour l’art de la forge.
En agriculture, de nouvelles méthodes, comme l’amendement à la chaux, rendent les terres plus fertiles. Les terroirs sont progressivement organisés en unités foncières, révélées par des parcelles quelquefois de grande ampleur. De plus, la métallurgie du fer, introduite vers 850 avant notre ère en Europe de l’ouest, permet de produire de nouveaux outils ou de les perfectionner afin d’augmenter l’efficacité des travaux agricoles les plus chronophages. Ainsi, la faux, la serpe et la moissonneuse, sorte de char poussé par un animal de somme et équipé de lames de métal, facilitent la récolte et le nettoyage des champs.
Les transports, la construction, l’armement ou l’équipement des guerriers bénéficient également des progrès de la métallurgie. Par exemple, la cotte de mailles est inventée par les Gaulois avant d’être adoptée par les Romains. Le forgeron met aussi au point certains objets de la vie quotidienne comme le couteau à lame repliable, le briquet à friction et une kyrielle d’outils artisanaux (pinces, gouges, limes, tenailles, burins) dont les formes se sont perpétuées jusqu’à nos jours.
L’ingéniosité des artisans de l’âge du Fer fait merveille dans beaucoup d’autres domaines comme la charpenterie, avec la construction à « pan de bois », et la charronnerie, dont témoigne la fabrication de véhicules à roues, vantée par Pline l’Ancien, auteur romain. Enfin, si l’invention du tonneau par les Gaulois est actuellement remise en question, ils en assurent indiscutablement la large diffusion puisqu’ils s’en servent pour transporter et stocker l’eau, la cervoise et, plus tard, le vin.
Antiquité
Poursuivant l'extension de leur empire fondé au VIIIe siècle avant notre ère en Italie, les armées romaines envahissent l’extrême sud de la Gaule à partir de -120. Puis, en -52, César conquiert le reste du territoire gaulois qui représente un espace riche et développé.
Si la civilisation gauloise s’adapte alors majoritairement aux codes de l’occupant romain, elle maintient toutefois certaines de ses traditions, le tout donnant lieu à une société originale, dite « gallo-romaine ».
Outre les nombreux monuments romains (enceintes, théâtres et amphithéâtres, mausolées, etc.) subsistant aujourd’hui, les vestiges mis au jour par l’archéologie préventive, en particulier depuis les années 1980, viennent éclairer bien d’autres aspects de cette culture.
En s’inspirant de nombreuses techniques, issues notamment de la Grèce antique et du monde méditerranéen, l’Empire romain se hisse au titre de civilisation la plus avancée de toute l’Antiquité. Insatiable amateur de modernité, il entraîne très tôt la Gaule dans une course à l’innovation.
Au Ier siècle de notre ère, les Romains initient les Gallo-Romains à l’utilisation du ciment, de machines de levage et de grues ainsi qu’à la plomberie afin de rénover ou de construire les bâtiments participant au spectaculaire embellissement de la Gaule. Les imposants édifices publics comme le forum, le théâtre gallo-romain ou les temples, typiques de la parure monumentale romaine, sont agrémentés d’arches et de voûtes de grandes dimensions réalisées grâce aux savoir-faire architecturaux romains. Sur ce territoire semblable à un gigantesque chantier, d’immenses aqueducs, comme le Pont du Gard, offrent la possibilité d’acheminer l’eau potable dans des canalisations de plusieurs dizaines de kilomètres.
Dans les zones cultivées, les rendements agricoles augmentent grâce à la performance de nouvelles machines telles que le moulin à eau – permettant de substituer l'énergie hydraulique à la force musculaire –, la presse à huile, le socle de charrue métallique et même, pour les vastes plaines du nord de la Gaule, la moissonneuse. Les surplus agricoles, stockés massivement comme l’attestent les nombreuses traces de silos, de dolia et d’amphores gallo-romains, sont alors exportés dans tout l’Empire.
Le réseau commercial est également alimenté par un artisanat dynamique. Les étoffes gallo-romaines sont très appréciées, tout comme une foule d’autres objets du quotidien (céramiques, fibules, outils, etc.) produits en série afin de répondre à la demande croissante.
Après la chute de l'Empire romain en 476, de nombreuses techniques sont oubliées ; certaines d’entre elles ne seront redécouvertes et reproduites qu'à partir du XIXe siècle, grâce à la science et à la puissance mécanique.
Moyen Âge
Suite à la chute de l’Empire romain d’Occident, la Gaule est dirigée par une succession de dynasties avant de mettre au point un nouveau type de gouvernance : l’ordre seigneurial. L’autorité royale est ensuite progressivement rétablie sur le royaume de France jusqu’à l’apparition de l’État moderne. Ce millénaire est également marqué par l’influence croissante de l'Église chrétienne sur la société.
Meurtri par de nombreux conflits, crises et épidémies, notamment en fin de période, le Moyen Âge n’en est pas moins riche en innovations techniques et culturelles. Il peut être considéré comme la première étape de la mécanisation, préfigurant l'activité industrielle de l'Occident.
En croisant l’analyse des traces matérielles avec celle des textes, les archéologues et les historiens portent aujourd’hui un nouveau regard sur le dynamisme technologique du Moyen Âge.
Les populations médiévales améliorent considérablement les innovations léguées par l’Antiquité et s’approprient les avancées récentes arabes et chinoises. Leur agriculture et leur artisanat évoluent au fur et à mesure de la maîtrise grandissante des sources d’énergie animale, hydraulique et éolienne.
Les nouvelles techniques d’attelage – collier d’épaule, fer à cheval, attelage en file et charrue – démultiplient la puissance de traction animale et accroissent les rendements agricoles.
Auparavant travaillées manuellement, des matières comme le textile, le cuir, la farine, l’huile et le papier voient également leur productivité bondir grâce à la généralisation du moulin à eau qui mécanise leurs chaînes de fabrication. À la fin du Moyen Âge, l’énergie hydraulique des moulins permet aussi d’actionner les marteaux et puissantes souffleries des hauts-fourneaux. Les pièces métalliques produites en grandes dimensions alimentent alors la construction des cathédrales et la fabrication des premiers canons à boulets en fonte.
L’art de la guerre est transformé par le perfectionnement de l’arc et de l’arbalète. Les progrès dans le domaine de la navigation (boussole, astrolabe, compas de marine, gouvernail d’étambot) facilitent les déplacements fluviaux et maritimes, que ce soit pour aller mener des batailles ou des échanges commerciaux.
Accompagnant la diffusion du christianisme, l’architecture religieuse accomplit, de siècle en siècle, de nouvelles prouesses techniques. L’art roman puis l’art gothique rivalisent d’ingéniosité pour ériger des édifices à la gloire de Dieu toujours plus grands et plus hauts, notamment grâce à la mise au point de la voûte d’ogive et des arcs-boutants.
Enfin, à partir du XIIIe siècle, les savoirs se transmettent dans les premières universités, puis circulent plus largement grâce à la naissance de l’imprimerie en 1438 et à la diffusion de l’écrit.
Époque moderne
Traditionnellement, les historiens font débuter la période Moderne à la découverte des Amériques et font coïncider sa fin avec celle de la Révolution française. Cependant, au travers des témoignages matériels, les archéologues observent des évolutions dans les manières de vivre au cours de cette période surtout à partir du milieu du XVIe siècle.
Au XVIIe siècle, l’Europe occidentale entre dans une ère proto-industrielle caractérisée par l’accélération des progrès scientifiques et techniques. Les bouleversements économiques, artisanaux, culturels et sociaux qu’ils engendrent seront les ferments de l’éthique capitaliste et de la Révolution industrielle du XIXe siècle.
En deux siècles à peine, la société de la période Moderne se transforme dans des proportions que ni l'Antiquité gallo-romaine, ni le Moyen Âge n’ont connues.
L’invention de l’imprimerie, au milieu du XVe siècle, provoque une explosion des sources écrites et accélère la circulation des idées et des techniques à travers toute l’Europe.
La diffusion de traités militaires permet une théorisation des arts de la guerre à l’échelle européenne, surtout à partir du XVIIe siècle. Pour s’adapter aux rapides évolutions de l’artillerie, les fortifications des villes connaissent de profondes transformations : bastions en pointe, demi-lunes, ravelins ou tranchées d’approche deviennent des éléments emblématiques de la guerre de siège pourtant pratiquée depuis l’Antiquité.
Les nombreux ouvrages agronomiques publiés traduisent un fort élan pour les sciences botaniques résolument inscrites dans une pensée économique visant l’amélioration des rendements. La viticulture, l’arboriculture et le maraîchage bénéficient de cette démarche. En cuisine et à table, les habitudes et les goûts s’élargissent. Les échanges avec le Nouveau Monde contribuent à l’introduction de nouvelles plantes en Europe. Parallèlement, certains fruits et légumes, déjà présents en France, sont davantage appréciés et de plus en plus couramment consommés.
À la faveur du commerce transatlantique qui fait suite à la découverte des Amériques, la navigation se perfectionne et les tonnages des bateaux augmentent. Ces progrès profitent également aux marines de guerre qui se développent.
D’autres découvertes scientifiques majeures marquent la période Moderne. La loi de la gravitation universelle (attraction terrestre) est décrite par l’anglais Newton vers 1680, tandis que des Français posent les bases de la recherche sur l’électricité. Les premiers grands essais de classification des espèces sont établis par Buffon, puis par Linné en Suède. Enfin, la machine à vapeur qui jouera un rôle décisif dans les transports et les usines pendant la Révolution industrielle du XIXe siècle, est mise au point en 1769 par l’Écossais James Watt.
Époque contemporaine
Caractérisée par une forte instabilité politique, cette époque est celle de l’émergence des premiers régimes démocratiques en France.
Également mise à l’épreuve par de nombreuses crises, guerres et pandémies, l’Europe entière connaît aussi, en l’espace de deux siècles, des changements technologiques d’une ampleur inédite. La Révolution industrielle du XIXe siècle bouleverse durablement ses économies et ses modes de vie.
La confrontation des données issues de l'archéologie avec les autres sources de documentation offre un regard enrichi sur cette histoire récente.
Aux XIXe et XXe siècles, la vapeur, le charbon, le pétrole, l’électricité et le nucléaire se succèdent. Véritable rupture technologique avec les siècles précédents, l’exploitation de ces nouvelles sources d’énergie entraîne de nombreux bouleversements économiques et sociaux.
L’invention du courant électrique continu, par exemple, participe d’une part à l’essor industriel grâce au premier moteur électrique construit par Barlow en 1822, et d’autre part, à la généralisation des éclairages public et domestique à partir des années 1910.
Les modes de déplacement font aussi leur révolution. Si la première locomotive à vapeur transportant des marchandises circule dès 1811 au Pays de Galles, le réseau ferroviaire ne se développe fortement qu’à partir des années 1840. Il est concurrencé par l’automobile après la Première Guerre mondiale, même s’il faut attendre la Seconde Guerre mondiale pour que la voiture se généralise. Grâce aux luttes sociales et au Front populaire, les travailleurs obtiennent 15 jours de congés payés annuels à partir de 1936. Certains paysages de campagne et de bord de mer se transforment pour s’adapter à la démocratisation des loisirs.
La gratuité et le caractère obligatoire de l’école publique, décrétés en 1881, visent également à réduire les inégalités sociales. En cette fin de XIXe siècle, la médecine accomplit de fulgurants progrès : mise au point de la vaccination antirabique en 1885, découverte des rayons X en 1895 et des groupes sanguins en 1901, qui ouvrent de nouvelles perspectives en matière de soins thérapeutiques.
Par ailleurs, le développement des télécommunications (télégraphe, radio, télévision), puis de la photographie et du cinéma, changent, progressivement mais radicalement, les modes et les vitesses de transmission de l’information. La société se regarde vivre et se met en scène. À partir de la fin du XIXe siècle, la diffusion à grande échelle de l’information réduit les distances culturelles entre centres et périphéries.
Plus près de notre époque, des matériaux emblématiques du XXe siècle, comme le béton ou le plastique, constituent déjà des marqueurs chronologiques pour les archéologues qui étudient les périodes très récentes.